Eût-il vécu, Cioran n’aurait certainement pas honoré de sa présence l’anniversaire de son centenaire en 2011: festivités et publicité, il les détestait tout autant. A juste raison, car son oeuvre ne doit pas attendre les grandes dates anniversaires pour refaire surface. Elle est toute présente à l’esprit des contemporains, les interpelle, leur lance des défis. Preuve en est la lecture publique organisée le jeudi 16 février par ICR Bruxelles à la Cinématek de Bruxelles, avec la participation de deux écrivains belges non-conformistes.
Elisa Brune et Théophile de Giraud, qui partagent les grandes obsessions cioraniénnes, ont provoqué le public afin de le faire réagir tant à leurs textes que, plus largement, au pessimisme du grand penseur.
Elisa Brune a publié chez Odile Jacob, en 2011, La mort dans l’ame, tango avec Cioran ; elle se déclare bouleversée par „l’appétit de néant” de Cioran. La nouvelle de sa mort lui a semblé d’autant plus ivraisemblable que le personnage était l’incarnation même de l’absence. Ainsi, son bouleversement et sa contrariété sont-ils passés dans un livre qui est, déclare Elisa Brune, „une danse endiablée entre Cioran, la mort et moi. Un tango sauvage à trois.”
Théophile de Giraud est un rebelle qui ne mâche pas se mots quand il s’agit de se présenter : „né en Belgique par hasard et sans conviction, suicidaire et récidiviste chronique entre 18 et 20 ans, autodidacte grognon et méticuleux, inadapté méthodique, insomniaque notoire...” Avec un auteur qui se présente comme cela, son Art de guillotinner les procréateurs : manifeste antinataliste (Le Mort-Qui-Trompe, 2006) n’a, quant à lui, plus besoin de présentation.
La lecture et le débât de la Cinématek de Bruxelles ont été organisés par le Service de la Promotion des Lettres, Rideau de Bruxelles et l’ Institut culturel roumain Bruxelles.