
Le 1er février 2020, la représentance de l'Institut culturel roumain à
Bruxelles a organisé une réunion entre les spécialistes roumains et belges à la
Maison des Arts, l'Université libre de Bruxelles, pour marquer la fin de
l'exposition "Brâncuși. La sublimation de la forme", présente à
BOZAR, la plus grande exposition monographique consacrée à l’œuvre de
Constantin Brâncuşi en Belgique.
La conférence a eu comme invités Mme Doina Lemny, commissaire de l'exposition "Brâncuși. La sublimation de la forme", Prof. Dr. Carmen Mușat, professeure à la Faculté des lettres de l'Université de Bucarest, Prof. Dr. Adrian Guță, professeur à la Faculté d'histoire et de théorie de l'art de l'Université nationale des Arts de Bucarest, Prof. Cristian-Robert Velescu, critique d'art et historien, professeur à l'Université nationale des Arts de Bucarest, Prof. Dr. Jan De Maere, historien d’art belge, conservateur, journaliste et auteur d'ouvrages en neurosciences. Avant le débat, les invités ont visité l'exposition "Brâncuşi. La sublimation de la forme". Le modérateur de ce débat a été Mme Liliana Țuroiu, directrice de l'ICR Bruxelles, coordinatrice générale EUROPALIA Roumanie.
Dans les deux panels, l’œuvre et la personnalité de Constantin Brâncuși ont été abordées dans un contexte multidisciplinaire. Les échos de l'œuvre de Brâncuși, les témoignages de ses contemporains, l'héritage artistique laissé par le grand sculpteur dans la création d'autres grands artistes roumains, comme le sculpteur Paul Neagu, ont été les principaux sujets abordés. Le travail de Brâncuși a été situé dans un ensemble esthétique plus large des avant-gardes européennes et l'influence de celles-ci sur la création de Brâncuși, un fait visible dans l'exposition "Brâncuși. La sublimation de la forme" de BOZAR, événement-phare du Festival International des Arts EUROPALIA Roumanie 2019.
Mme Doina Lemny, commissaire de l'exposition de BOZAR, a évoqué la performance de l'organisation d'une rétrospective Brâncuși de cette ampleur, et a déclaré : « Tout d'abord, je tiens à remercier l'Institut culturel roumain pour cette réunion spéciale. L'exposition à BOZAR était un pari pour moi. Une telle exposition n'est faite dans la vie d'un conservateur qu'une seule fois. Bien sûr, j'ai aussi fait des expositions de Brâncuși, des expositions - dossiers, comme je les appelle, à Pompidou et dans bien d'autres endroits. Il est presque impossible de penser et de faire une exposition rétrospective Brâncuși aujourd'hui, car il a créé des sculptures que l'on retrouve partout dans le monde. Brâncuși a conservé son héritage roumain, comme nous le conservons tous, car personne ne peut se débarrasser de l'héritage du ‘pays de ses ancêtres', mais il est devenu universel précisément grâce à un dialogue qu'il a engagé avec les confrères, des artistes comme lui, avec lui-même et avec la matière. »
Le professeur Cristian Robert Velescu a abordé, lors de la conférence, le discours de ‘l'architecte’ Brâncuși, analysant la période de début du sculpteur : « On sait moins que Brâncuși a voulu se manifester en tant qu'architecte depuis le début de sa création, une période pleine d'originalité. Une œuvre de Craiova, la version fragmentaire du Baiser, portait dans un catalogue de 1910 le titre mystérieux de ‘fragment d'un capitel’. Par cela, je voudrait dans mon discours montrer que Brâncuși aurait voulu être un artiste-architecte. Mon intervention peut être considérée comme une continuité de l'exposition de BOZAR, que je viens de visiter, admirable, un excellent équilibre entre la présentation de son œuvre et sa documentation.»
Le critique d'art belge Jan de Maere a évoqué l'héritage historique de l'influence brancusienne : « Le grand art est basé sur la simplification, tout en se concentrant sur l'essence. Photographiant son travail, Brâncuși a adopté une attitude analytique envers ses créations, tout en jouant avec les structures, les surfaces, la lumière et l'ombre. L'œuvre elle-même est un rituel d'initiation, miroir des questions de l'artiste sur le monde apparent. Son approche sur la réalité profonde des choses unit les aspects universels, tels que l'artisanat, le folklore, la mythologie, la philosophie et les légendes avec le monde sensoriel. Ces expériences sont basées sur son contexte roumain depuis l'enfance. Son art a apporté la nouveauté par l'essentialisation. Comme d'autres génies,Brâncuși n'a pas laissé seulement des héritiers apparents, mais des adeptes, dont certains de grande valeur : Paul Neagu, Ovidiu Simionescu. »
Le professeur Adrian Guță a fait une présentation sur Paul Neagu lors de la conférence, l'un des plus importants sculpteurs roumains contemporains, et sur l'influence que Constantin Brâncuși a exercée sur lui. « J'ai choisi de parler de Paul Neagu, l'un des artistes roumains contemporains les plus connus, les plus remarquables, car Brâncuși était l'une des principales sources de son inspiration. Nous partons du fait que Brâncuși est l'artiste roumain le plus important et l'un des sommets de l'art moderne. Fondamentalement, l'art moderne repose sur ses épaules. Paul Neagu est né en 1938 en Roumanie et s'est installé au Royaume-Uni dans les années ‘70, marquant, à son tour, certains des sculpteurs importants d'aujourd'hui, tels que Anish Kapoor, Antony Gormley, Tony Gragg, Rachel Whiteread. C'est ainsi que Brâncuși transcende l'époque. »
Le professeur Carmen Mușat a choisi d'analyser l’œuvre de Brâncuși dans le contexte multiculturel de l'avant-garde : « Dans l'environnement avant-gardiste de Paris, Brâncuși a fonctionné comme un catalyseur, en présence duquel plusieurs démarches artistiques et idéologies ont interagi, sans que son travail puisse être subsumé dans une seule direction. Bien que les expériences d'avant-garde ne lui soient pas étrangères et que de nombreux représentants roumains et étrangers de l'avant-garde soient des amis proches, pour Brâncuși l'avant-garde est un état d'esprit et moins une doctrine esthétique. Au début du XXe siècle, tous les artistes pensaient que tout devait être détruit pour être reconstruit. Dans la vision de Brâncuși, la mission de la sculpture n'est pas de représenter la réalité ou de ressembler au modèle. Son effort est de surprendre une réalité intérieure, un sentiment, un état d’esprit ou un rêve. »
Liliana Țuroiu, directrice de l'ICR Bruxelles et coordinatrice générale EUROPALIA Roumanie, a remercié les invités de marque, mentionnant que : « L'exposition de Brâncuși est terminée, mais EUROPALIA continue. Les expositions "Dacia Felix" de Tongres et "Roots" de Liège raviront le public belge jusqu'en avril. Dans la série d'événements marquant la fin d'EUROPALIA Roumanie, cette conférence est une initiative naturelle et nécessaire. L'ICR Bruxelles a décidé d'organiser cette rencontre académique en présence des personnalités de haut niveau, afin que les échos de l'exposition Brâncuși se poursuivent dans l'espace européen. L'impact du festival EUROPALIA Roumanie sera durable. Je suis convaincue que des professionnels de différents domaines artistiques vont interagir et, à l'avenir, il y aura de plus en plus de beaux projets et collaborations, et la créativité roumaine continuera à être visible. Je pense que nous ne parlons pas d'une fin, mais plutôt d'un début. »
Koen Clement, directeur général EUROPALIA International, a remercié les partenaires roumains et a été impressionné par le haut niveau de l'événement. Il a souligné l'opportunité d'organiser cette conférence qui « peut être considérée comme le corollaire de l'exposition "Brâncuși. La sublimation de la forme" ». Il a également apprécié la qualité des interventions des invités qui, à travers les communications académiques, ont, une fois de plus, souligné l’œuvre et la personnalité du grand Brâncuși. « Maintenant, je m’explique le grand nombre de visiteurs de l'exposition Brâncuși de BOZAR et l'émotion que j'ai vue, non rarement, sur le visage de certains d'entre eux. »
Le peintre roumain Emil Ciocoiu, présent à l'événement, a exposé pour la première fois, lors de la conférence, la peinture "Hommage", une ancre visuelle pour l'œuvre de Brâncuși. La peinture sera exposée prochainement à Târgu Jiu. En 2019, Emil Ciocoiu a eu une exposition impressionnante à Bruxelles, pendant la Présidence de la Roumanie au Conseil de l'Union européenne. De même, "ses allégories ont été exposées dans le hall de la mairie d'Aachen, lorsque la reine Beatrix des Pays-Bas a reçu le prix Charlegmane", comme l'a déclaré le critique d'art Marius Tița, exégète de l’œuvre d'Emil Ciocoiu.
La conférence organisée par ICR Bruxelles a réuni SE Andreea Păstârnac, ambassadrice de Roumanie au Royaume de Belgique, Koen Clement, directeur général EUROPALIA International, Philippe Beke, ancien ambassadeur de Belgique en Roumanie, et un groupe d'étudiants du Collège d'Europe de Bruges a été aussi présent. L'Institut culturel roumain a été représenté par Alexandru Drăghici, secrétaire générale, Daniela Soroș, chef du service Grands Programmes et Claudia Lazăr, experte en arts visuels, ainsi que l'équipe ICR Bruxelles
Le festival EUROPALIA est considéré comme le plus grand événement culturel de Belgique, organisé sous le patronage de la famille royale de Belgique, tous les deux ans, en Belgique et dans les pays voisins - France, Pays-Bas, Luxembourg et Allemagne. L'Institut culturel roumain est le coordinateur de la participation de la Roumanie à la 27e édition du festival EUROPALIA, un projet de grande envergure déroulé d'octobre 2019 à février 2020, mis en œuvre en collaboration avec le Ministère des Affaires étrangères, le Ministère de la Culture et de l'Identité nationale et le Secrétariat général du gouvernement auprès d’EUROPALIA International, l'organisateur de l'événement. La 27ème édition du festival EUROPALIA est dédiée à la Roumanie.